dimanche 3 juin 2012

Les Chroniques du Jiang hu - La Rédemption du Phénix -

Exercice inhabituel de ma part aujourd'hui, la critique du texte d'autrui. Et pas de n'importe quel autrui, parce que je connais l'auteur, le sieur Romain d'Huissier. C'est donc d'autant plus périlleux qu'il faut rester juste dans l'analyse et laisser de côté la partie affective.



Avant de commencer, il faut que je précise que :
1/ Je suis totalement étranger à l'univers abordé.
2/ Ça ne m'attire pas plus que ça.
3/  Que je ne suis pas du tout fan des "films de Sabre" et que mon incompétence en ce domaine m'a même fait confondre les Samouraïs avec les Chevaliers Chinois (j'avoue que pour moi c'est la même chose : des mecs qui se battent avec des sabres en poussant des cris aigus), au grand dam de l'auteur !

Bref, tout ça pour dire que je pars avec un a priori assez conséquent sur ce fascicule de 35 pages et qu'il va falloir beaucoup pour me convaincre de le pas avoir dépensé 7,50€ dans le vide. Rude challenge, non ?

La Rédemption du Phénix, de quoi que ça cause ?

Le fascicule s'ouvre sur un lexique de termes "barbares" traduits en français pour le commun des mortels. Ça donne le ton quant à la précision de l'univers, et on se dit d'emblée qu'il va falloir s'accrocher à son slip pour ne pas se perdre dans les méandres du vocabulaire. Dommage pour l'immersion dans le récit s'il faut se reporter régulièrement au lexique ? A voir...

Zhi Xiang : voilà le nom du héros de ce texte. Un jeune homme qui parcours forêts et vallées à la recherche de son idéal de vie. Son chemin va l'amener à croiser la route des habitants d'un petit village paisible qui sont sous le joug d'un groupe de pillards qui se servent d'eux comme d'un magasin - sauf qu'ils ne paient pas ce qu'ils achètent. Ce qui a un côté pratique, il faut le concéder, mais c'est tout de suite beaucoup moins agréable pour les habitants du village en question...
Jeune héros au coeur vaillant, Zhi Xiang décide de prendre fait et cause pour les habitants.

Et c'est là que le texte devient vraiment intéressant. Non pas par le thème de l'histoire (assez classique au demeurant) mais par les affrontements qui s'y déroulent.

On sent bien que Romain maîtrise son univers (sa ludographie parle d'elle-même de toutes façons). Et ce qui est parfaitement probant, c'est qu'il arrive à décrire les nombreux combats qui émanent le récit avec un lyrisme totalement visuel et donc d'une facilité de compréhension, même pour le lecteur néophyte, assez bluffante.

A la lecture des différents "fights" qui parsèment les 35 pages, j'avais l'impression de regarder un épisode de Dragon Ball Z.
Alors ok, la comparaison peut paraître étrange mais je m'explique : Les combats de ce manga sont d'un spectaculaire qui m'a toujours fasciné, avec des personnages qui font des tours dans les airs et qui assènent 968 coups de poing en 0.04s. Le genre de truc qui fait dire "Ouah".
Ici c'est pareil, et pourtant, avec une difficulté de plus : c'est écrit, et non vu. Passées les quelques premières lignes, les mecs s'animent vraiment devant les yeux et on les voit virevolter dans tous les sens en enchaînant les passes d'armes et autres bottes secrètes. 
Même l'Idéogramme de l'Imprévisibilité devient limpide, l'imagination du lecteur faisant le complément à ce qui est explicité dans le texte pour se faire une représentation épique des mouvement incessants et mortels du jeune chevalier.

Et c'est là ou Romain a gagné son pari (avec moi en tout cas) car j'attendais le prochain combat avec impatience. J'avoue que je ne suis pas repassé souvent par le lexique du départ, et je faisais fi des quelques termes techniques qui me manquaient dans la lecture. Ça ne me gênait plus. Ce que je voulais c'était le combat suivant pour voir d'autres joutes spectaculaires.  Mais 35 pages c'est 35 pages, donc pas extensibles à l'infini. Dommage, j'aurai bien aimé voir plus de découpages au sabre.

Qui plus est, l'histoire recèle un twist intéressant (j'avoue m'être laissé aller à un "ah ben merde alors...).

Une autre scène m'a évoqué un passage du Tombeau des Lucioles (oui, je sais, je multiplie les analogies, mais je compare avec ce que je connais, hein !) apportant une touche plus douce au récit.

Quant à la fin, elle laisse la porte ouverte à d'autres textes, surtout qu'il y a plusieurs pistes envisageables.

Alors, 7,50€ à la poubelle ou bien ?

Et bien pas du tout. La lecture des 35 pages a gommé toutes les mauvaises idées que j'avais à l'esprit avant de commencer ma lecture. J'ai apprécié le texte au delà de mes espérances, j'ai découvert un univers que je ne connaissais presque pas et j'ai vu des combats qui "déchirent sa mère". Du tout bon, en fait, et pari réussi (et c'était loin d'être gagné, croyez-moi, parce que je suis assez borné sur mes avis).
Si il y a un second opus, je serai un des premiers à me le procurer...

Good Job, Romain !

Après avoir parlé du contenu, j'aimerai juste finir ce petit texte du parlant du contenant.
Aujourd'hui, les livres sont ultra formatés : en gros, c'est soit du grand format soit du poche.

Le Carnoplaste (dont vous trouverez un lien direct vers le site dans la partie appropriée du blog) a choisi un parti pris différent en présentant ses textes dans un format "fascicule".
Ça donne un joli objet, agréable à la prise en main, plus facile à lire qu'un livre de poche, avec une mise en page claire et une police de caractère très douce à l'oeil qui donne à l'ensemble une qualité de réalisation qui n'a rien à envier aux grands éditeurs (au contraire même, la lecture en deux colonnes est particulièrement agréable).

Tout ça fait qu'on a vraiment l'impression d'en avoir pour son argent : un bel écrin pour un joli texte.

Comme quoi, l'originalité existe toujours, et c'est tant mieux !